Le gouvernement de Raul Castro lève les restrictions de voyage par la mer pour tous les Cubains. Ils pourront désormais rejoindre les Etats-Unis dans des croisières, ou en tout cas par bateau, en toute légalité. Depuis longtemps, seul l’avion permettait aux citoyens de l’île de voyager légalement en Amérique du Nord.
Feu vert de La Havane. Rendre les traversées légales pour les Cubains par la mer, c’est fait, et c’est une nouvelle illustration du rapprochement diplomatique entre Cuba et les Etats-Unis. Cette mesure autorise les allers-retours entre les deux pays sur des bateaux de marchandises ou de tourisme, que les voyageurs soient passagers ou membres d’équipage.
Le détroit de Floride risque de s’animer. Après la levée de cet obstacle, tout semble en place pour assister à un grand « boom ». « Côté américain, vous avez déjà des transports sur la côte sud qui sont prêts pour des échanges avec Cuba », rappelle la politologue Janette Habel, enseignante à l’Institut des hautes études de l’Amérique latine à Paris III et spécialiste de l’île castriste.
La première croisière entre la Floride et Cuba – moins de 150 kilomètres de distance – pourrait avoir lieu dès le 1er mai prochain. Le premier opérateur mondial en la matière, l’Américain Carnival, avait en effet déjà obtenu la permission des deux gouvernements pour effectuer des croisières entre les deux rives. Mais jusqu’ici, Carnival ne pouvait accepter les réservations des Américains d’origine cubaine. C’est désormais le cas.
Pouvoir venir à Cuba par bateau
Ce sont les protestations qui ont eu raison de cette situation. « Les citoyens cubains qui résident à l’extérieur ne pouvaient rentrer et revenir à Cuba que par la voie aérienne. Et par conséquent, ils ne pouvaient pas revenir en bateau. Et encore moins, d’ailleurs, être employés, salariés sur les nouveaux bateaux de croisière qui, maintenant, arrivent à Cuba », explique Mme Habel.
José Daniel Ferrer, leader de l’organisation dissidente Union patriotique de Cuba, basée à Santiago de Cuba, salue la levée des restrictions : « Ceux qui ont de la famille à l’extérieur accueillent cette mesure de façon très positive, parce qu’ils vont pouvoir venir à Cuba par bateau, mais aussi parce qu’ils pourront être passagers de ces embarcations pour voyager à l’extérieur », commente-t-il.
Mais d’expliquer que cette levée de restrictions ne profitera « pour le moment qu’à une petite classe de la société » cubaine, à savoir « ceux qui ont le pouvoir économique ». « Le travailleur cubain ne pourra pas se le permettre. La vie est trop chère, les salaires sont trop faibles pour oser ne serait-ce que rêver faire une croisière ou emprunter l’un de ces bateaux », confie-t-il.
La porte vers d’autres droits ?
Qu’à cela ne tienne, plusieurs compagnies et opérateurs devraient suivre le mouvement. MSC Croisières a annoncé qu’elle baserait un paquebot dans la capitale cubaine dès l’hiver prochain. « Les ferries anciens, qui ne circulaient plus depuis pratiquement la Révolution, vont reprendre. Et puis, également, les bateaux de croisière et même le trafique de marchandises va beaucoup se développer », entrevoit Janette Habel.
La politologue parle d’un probable « essor du trafic maritime tant sur le plan touristique que sur le plan commercial », y voyant une « normalisation technique entre les deux pays ». « Sur la question du courrier, sur les téléphones, y compris sur le plan d’Internet et des échanges entre les deux pays, les progrès sont maintenant notables. C’est sur les grands dossiers, pour le moment, que les progrès sont assez limités », tempère-t-elle.
« Nous espérons que cette lutte pour faire reconnaitre notre droit de voyager en bateau ouvre la porte à d’autres droits. Nous espérons que le régime acceptera d’accorder aux Cubains les droits et libertés qui sont violés encore aujourd’hui », abonde José Daniel Ferrer de l’Union patriotique de Cuba.
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