La vigilance rouge inondations a été levée vendredi matin en Seine-et-Marne et plus aucun département français n’est donc en alerte maximale. «On est vraiment en décrue. Cela ne veut pas dire qu’on n’a plus les pieds dans l’eau (dans certaines villes) mais on est sur la bonne voie, on n’aura pas de montée prévue dans les prochains jours», a indiqué Bruno Janet, chef du pôle de modélisation de Vigicrues. Restent en vigilance orange l’Ile-de-France, le Cher, l’Indre, l’Indre-et-Loire, le Loir-et-Cher et le Loiret. Une réunion des ministres concernés par les inondations est en cours depuis le début de l’après-midi. Libération fait le point sur la situation.

Pics de crues

La Seine. Après plusieurs jours de pluies exceptionnelles, la crue de la Seine a atteint à 17 heures 6,05 mètres sous le pont d’Austerlitz à Paris, un niveau jamais atteint depuis plus de trente ans. Selon la ministre de l’Environnement Ségolène Royal, le niveau du fleuve se stabilisera cette nuit, «entre 6,10 et 6,40 mètres». Depuis mardi, la circulation est interdite sur la Seine.

La crue «devrait avoir des impacts en aval de Paris, sur le camping du Bois de Boulogne, l’Ile de la Jatte, l’Ile Saint-Germain, ainsi qu’à Rueil-Malmaison avec de possibles évacuations», a annoncé le ministère de l’Environnement. Comme douze autres départements, la capitale est placée en vigilance orange, le niveau rouge étant déclenché qu’à partir de 7,13 mètres. Plusieurs stations de métro et RER situées en bord de Seine sont fermées, même si la RATP a tenu à rassurer sur l’état du réseau en précisant que son «seuil d’alerte se situait à 6,60 m». Selon François Duquesne, directeur de Vigicrues interrogé par France Info, les conséquences pour les Parisiens resteront «limitées» : «Dans le scénario le plus pessimiste, à 6m50, il pourrait y avoir un certain nombre de caves inondées en bordure de fleuve. A 6m30, il y aura beaucoup moins de désagréments.»

Le Loing et son principal affluent l’Ouanne ont connu une crue exceptionnelle, la lente décrue est en cours mais les niveaux restent très élevés indique le site Vigicrues. Le Cher est également à un niveau très élevé et les pics de crue sont attendus vendredi soir ou samedi. Compte tenu de la fragilité des digues, 3 000 habitants ont donc été évacués préventivement en Indre-et-Loir indique la Préfecture sur son site. La Loire va atteindre son niveau le plus élevé vendredi dans la soirée.

Trafic

Routes. La préfecture des Hauts-de-Seine a annoncé procéder à la fermeture du Duplex, un tunnel de l’autoroute A86, dès 15 heures. Deux sections de l’A10, coupées depuis mardi matin, ont été localement rouvertes jeudi soir mais l’accès à l’autoroute est toujours interdit sur plusieurs tronçons : depuis Paris en direction du Sud, l’autoroute A10 est fermée à partir du péage de Saint-Arnoult, mais pas dans l’autre sens. Depuis Bordeaux en direction du Nord, l’autoroute est fermée à Tours. Mais dans l’autre sens, la circulation est possible entre Orléans-Centre et Tours. Bison Futé conseille à tous les usagers désirant se rendre dans l’agglomération d’Orléans «de différer leurs déplacements» jusqu’à lundi. 5 000 automobilistes s’étaient retrouvés mardi piégés par les inondations pendant plus de dix heures sur l’A10 sur plusieurs kilomètres.

Jeudi après-midi, pour permettre l’évacuation de 300 véhicules bloqués sur l’A10, Vinci Autoroutes voulait mettre en œuvre des opérations de pompage et d’endiguement afin de réaliser un «corridor sec» protégé par des digues provisoires, rappelle France Bleu Orléans. L’opération de pompage, qui n’avait finalement pas pu avoir lieu jeudi, est en cours ce vendredi. 200 salariés sont mobilisés.

Plusieurs routes sont aussi coupées dans le Cher et autour de Blois. Vous pouvez suivre l’état du trafic sur le site inforoutes 18.

RATP et SNCF. Le trafic est très perturbé dans les transports franciliens  (RER B, D, E, C et Tramway), notamment dans l’est de l’Ile-de-France (à cause des inondations mais aussi en raison du mouvement de grève). Le RER C, qui longe la Seine est interrompu entre Paris-Austerlitz et Javel, Paris-Austerlitz et Pontoise (Val-d’Oise) et toute la ligne, qu’empruntent 500 000 passagers par jour en moyenne, sera totalement fermée ce vendredi à partir de 20 heures. «Le trafic restera fortement perturbé au moins jusqu’au lundi 6 juin inclus», précise la SNCF.

Sur la ligne N, aucun train ne circule entre Plaisir Grignon et Mantes-la-Jolie, le trafic est également fortement perturbé entre Paris Montparnasse et Versailles. Sur la ligne P, le trafic est interrompu«pour plusieurs jours» entre Tournan et Coulommiers et sur la ligne R,entre Moret et Montargis, communes touchées par les inondations.

A Paris, deux stations de métro, Saint-Michel (sur la ligne 4) et Cluny-La Sorbonne (sur la ligne 10) sont également fermées. La RATP précise que le seuil d’alerte pour son réseau de métro se situe à une hauteur de 6,60 mètres de la Seine.

Electricité

Environ 20 000 foyers sont toujours privés de courant dans le Loiret, le Loir-et-Cher et l’Ile-de-France a indiqué le gestionnaire du réseau français de distribution d’électricité Enedis. Dans le détail, 9 400 clients étaient victimes de coupures en Seine-et-Marne, 6 500 dans l’Essonne, 800 dans le Val-de-Marne et 140 dans les Yvelines, selon un point diffusé vendredi matin. Dans le département du Loiret, 2 000 clients étaient sans électricité et 1 200 dans le département du Loir-et-Cher. A Paris, une aquabarrière (de 2 mètres de hauteur et 230 mètres de long) a commencé a être installée au niveau d’un poste de transformation électrique près du pont de l’Alma pour protéger cette installation de la montée des eaux de la Seine.

Evacuation

Depuis le week-end dernier, 20 000 personnes ont été évacuées et mises à l’abri par les services de secours, au cours de 16 000 interventions sur l’ensemble du territoire. Dans l’Essonne, notamment à Longjumeau dont le centre a été totalement inondé, les habitants, privés d’électricité et de chauffage, ont été évacués en barques. En plus des habitants déjà déplacés à Villandry (Indre-et-Loire), une évacuation préventive de La Chapelle-aux-Naux, sur les bords de la Loire, est aussi prévue vendredi après-midi, en raison de risques de brèche sur une digue.

A Villeneuve-Saint-Georges (Val-de-Marne), l’armée a évacué vendredi des centaines d’habitants en raison de la crue de la Seine. A Crécy-la-Chapelle (Seine-et-Marne), c’est la rivière le Grand Morin qui déborde.

Agriculture

Les grandes cultures, le maraîchage, l’arboriculture comme l’élevage sont touchés par les inondations en Ile-de-France ont déclaré vendredi les professionnels, demandant à l’Etat d’étudier les indemnités possibles.Dans un communiqué commun, la Chambre interdépartementale d’agriculture, la FDSEA et les Jeunes Agriculteurs d’Ile-de-France«interpellent les services de l’Etat pour qu’ils prennent toutes les dispositions nécessaires afin de faire reconnaître le caractère exceptionnel de cet événement climatique, et d’étudier, en lien avec la profession agricole, les voies d’indemnisation possibles».

Dans les grandes cultures de blé, d’orge ou d’avoine, «de nombreux hectares de céréales sont versés». Le pois de printemps «est asphyxié et devient jaune», tandis que des maladies se développent notamment dans la féverole, selon la profession. Pour les maraîchers, ces pluies excessives ont plus d’impact qu’une crue en hiver où les plantations sont minimes car au printemps ce sont les plants prêts à être vendus qui sont concernés. Ainsi, les fraises de plein champ et autres fruits rouges et les salades sont dévastés. «Les producteurs situés dans les vallées de la Mauldre, de l’Yvette et de la Seine sont les plus touchés», indique le communiqué.

Bâtiments, musées et parcs fermés

Musées. Le musée d’Orsay, fermé depuis jeudi soir pour mettre à l’abri ses réserves menacées par la crue de la Seine, gardera portes closes jusqu’à mardi, lundi étant son jour de fermeture habituelle. Sur l’autre rive, le Louvre, musée le plus visité au monde avec quelque 9 millions de personnes par an, est aussi fermé ce vendredi pour évacuer «à titre préventif» des œuvres stockées dans ses réserves. Le Grand Palais a également fermé ses portes au public vendredi en début d’après-midi.

Bibliothèque. Les deux sites de la Bibliothèque nationale de France (BNF) à Paris sont fermés au public et aux chercheurs depuis vendredi et jusqu’à dimanche soir.

Assemblée nationale. L’Assemblée nationale attend de son côté l’éventuel déclenchement du «plan crue» par la préfecture pour mettre elle aussi à l’abri les oeuvres stockées dans les réserves du sous-sol du palais Bourbon.

Parcs. Le parc des Buttes-Chaumont et une quarantaine de squares à Paris ont été fermés à cause des sols fragilisés et des risques de chutes d’arbres. La mairie a également décidé de ne pas organiser comme prévu l’ouverture nocturne des parcs et jardins ce week-end.

Tourisme

Ce matin, la ministre de la Culture, Audrey Azoulay, tenait une réunion avec les responsables des institutions culturelles publiques et des territoires touchés par les inondations. Les touristes actuellement à Paris ont été douchés en début de semaine par des pluies torrentielles qui ont fait monter le niveau de la Seine, et les privent de bateaux-mouches et aussi de visites dans certains musées, fermés pour mettre une partie de leurs collections à l’abri.

Sodexo Sport et Loisirs – qui détient 65% des bateaux navigant sur la Seine – indique «rediriger 60% de la clientèle vers d’autres établissements que nous possédons comme le Lido, la Tour Eiffel ou encore la Maison des arts et métiers. Chaque soir c’est quand même 700 personnes à reclasser», résume la directrice générale Nathalie Bellon-Szabo. Autre joyau touristique national, dans le Loir-et-Cher, le château de Chambord, encerclé par les eaux, restait lui aussi fermé vendredi.