La Pologne, qui refuse le projet de réforme d’Emmanuel Macron sur le travail détaché dans l’UE, a vivement réagi vendredi aux propos du Président français, pour qui Varsovie se mettait « en marge de l’Europe ». « Je conseille à M. le président qu’il s’occupe des affaires de son pays », a taclé la Première ministre, Beata Szydlo.

Emmanuel Macron clôture vendredi sa tournée européenne. S’il a visité l’Autriche, la Roumanie et la Bulgarie, c’est son bras de fer avec la Pologne qui restera comme l’un des faits marquants de son déplacement de trois jours, censé rallié des États à sa réforme de la directive sur le travail détaché. Varsovie a ainsi fermement répondu au Président français, vendredi, et à « ses déclarations arrogantes ». Plus tôt, Macron avait violemment critiqué le refus polonais de durcir cette directive, « une nouvelle erreur » commise par ce pays qui se « met en marge » de l’UE, selon lui. « La Pologne n’est en rien ce qui définit le cap de l’Europe », avait-il notamment lancé lors d’un point de presse à Varna (Bulgarie).

Le chef de la diplomatie polonaise puis la Première ministre, Beata Szydlo, lui ont successivement répondu. « Peut-être, ses déclarations arrogantes sont-elles dues à son manque d’expérience et de pratique politique, ce que j’observe avec compréhension, mais j’attends qu’il rattrape rapidement ces lacunes et qu’il soit à l’avenir plus réservé », a déclaré la dirigeante au site wpolityce.pl, un portail Internet conservateur. « Je conseille à M. le président qu’il s’occupe des affaires de son pays, il réussira alors peut être à avoir les mêmes résultats économiques et le même niveau de sécurité de ses citoyens que ceux garantis par la Pologne », a encore lancé Beata Szydlo, ajoutant rappeler « à M. Macron que la Pologne est membre de l’Union européenne au même titre que la France ».

Emmanuel Macron « ne sait pas ce qui se passe dans notre partie de l’Europe »

« Ce n’est ni le président de la France ni aucun autre dirigeant qui décidera personnellement de l’avenir de l’Europe mais l’ensemble des membres de la communauté », a-t-elle aussi déclaré, appelant « M. le président à rester plus conciliant et à ne pas briser l’UE ». « La Pologne ne s’isole pas et n’est pas isolée », avait peu avant déclaré le chef de la diplomatie polonaise, Witold Waszczykowski, ajoutant qu’Emmanuel Macron « ne sait pas ce qui se passe dans notre partie de l’Europe ». Le chargé d’affaires ad interim de la République Française en Pologne, Sylvain Guiaugué, a par ailleurs été convoqué vendredi au ministère des Affaires étrangères à Varsovie où on lui a fait part de « l’indignation du gouvernement polonais suite aux propos du président français ».

Soutenu par Berlin, le Président français a rencontré les dirigeants tchèques, slovaques, roumains et bulgares, qui tous se sont dit d’accord pour discuter de cette réforme. Dès lors, le refus de la Pologne, comme celui de la Hongrie, pourrait ne pas être compromettant pour faire valider le nouveau texte. La France, qui avait fait bloquer un premier accord jugé trop laxiste en mai, en espère un dès octobre lors d’un sommet social à Bruxelles. « Le peuple polonais mérite mieux que cela et la Première ministre aura beaucoup de mal à expliquer qu’il est bon de mal payer les Polonais », avait également affirmé Emmanuel Macron, après le non de Varsovie, jeudi soir. « Pour ce qui est des travailleurs délégués, c’est la Pologne et l’Europe centrale qui défendent les principes du marché commun alors que la France tente de démonter l’un des piliers de l’UE », a au contraire affirmé Beata Szydlo.