Ses compatriotes le connaissent comme « l’homme qui a acheté Gatwick », l’aéroport londonien. Désormais, on le surnomme aussi « le Nigérian qui a conquis le cœur de Donald Trump ». Avocat, grand banquier, investisseur international, Adebayo Ogunlesi évolue dans le monde de la finance avec brio et enchaîne les positions prestigieuses. A 63 ans, le milliardaire installé à New York rejoint désormais le « forum stratégique » du nouveau président des Etats-Unis, un organe consultatif présidé par le patron du fonds d’investissement Blackstone, Stephen Schwarzman. Donald Trump consultera régulièrement le forum afin d’élaborer et d’évaluer sa politique économique. M. Ogunlesi y figure comme le seul Africain parmi les seize grands PDG qui participeront à ces rencontres.
Originaire de la petite ville de Sagamu, à une cinquantaine de kilomètres de Lagos, Adebayo Ogunlesi, dit « Bayo », est le fils d’un professeur de médecine. Il a démarré ses études supérieures dans l’ardente métropole nigériane, intégrant le prestigieux King’s College Lagos, une institution académique qui a vu passer sur ses bancs bon nombre d’économistes renommés au Nigeria. Adebayo Ogunlesi passe ensuite par la case Oxford, au Royaume-Uni, où il obtient une licence en philosophie, politique et économie. Très à l’aise dans son domaine, il termine major de promotion. A 26 ans, il décroche également un diplôme de la faculté de droit de Harvard, classé toujours parmi les plus brillants élèves.
De la Cour suprême à Wall Street
A peine sorti de l’école, et déjà un CV intimidant : le Nigérian démarre sa carrière en tant que greffier pour le juge de la Cour suprême des Etats-Unis, faisant de lui le premier greffier non américain à la Cour. Il passe ensuite à la pratique privée et devient avocat pour le cabinet juridique Cravath, Swaine et Moore à New York, où il travaillera près de deux ans. En 1983, à tout juste 30 ans, « Bayo » Ogunlesi fait son entrée dans le monde de la finance internationale en rejoignant Credit Suisse First Boston (CSFB). Au sein de la banque d’investissement, il se sent comme un poisson dans l’eau et gravit les échelons jusqu’à atteindre le sommet : il en prend la tête en 2002 et obtient en parallèle un siège au conseil d’administration.
Dans le monde de la finance américaine, le Nigérian a su se faire remarquer à maintes reprises. Sa société new-yorkaise de capital-investissement, Global Infrastructure Partners (GIP), gère l’aéroport de Gatwick de Londres dont elle possède près de 42 % des parts acquises en 2009 pour 1,51 milliard de livres sterling (1,74 milliard d’euros). Particulièrement à l’aise dans cet exercice, il s’offre en 2012 l’aéroport d’Edimbourg, en Ecosse. M. Ogunlesi possède à l’époque déjà l’aéroport de London-City, revendu en 2016 dans une transaction s’élevant à quelque 2 milliards de livres sterling.
Au Nigeria, l’engagement récent de « Bayo » Ogunlesi auprès du nouveau locataire de la Maison Blanche surprend parfois : « Finalement, on dirait que Donald Trump n’ira pas au bout de son intention d’expulser tous les Nigérians des Etats-Unis », ironisait à la mi-décembre 2016 le chroniqueur Lekan Sote en rebondissant sur une des nombreuses saillies du président-élu lors de sa campagne. Le ministre des affaires étrangères Geoffrey Onyeama a quant à lui accueilli la nouvelle avec un soupçon d’amertume : « C’est presque paradoxal. Au pays, nous aurions certainement besoin de gens du calibre de Bayo Ogunlesi, et finalement, ce sont les Etats-Unis qui vont bénéficier de ses talents étonnants. »
Comments
0 comments