Suspension ne veut pas dire retrait : c’est ainsi que l’opposition a justifié la participation d’Hama Amadou au second tour de l’élection présidentielle, le 20 mars, après avoir annoncé mardi que l’opposition se retirait du processus électoral.
« La COPA (coalition de l’opposition) a juste dit qu’elle suspend sa participation au processus, mais Hama est bien partant pour l’élection », a indiqué Me Mossi Boubacar, un de ses avocats joint au téléphone par l’AFP. « Hama n’a pas dit qu’il va désister », a insisté l’avocat, réagissant ainsi à des propos du président de la Commission électorale nationale indépendante du Niger (Céni), qui avait affirmé jeudi sa « détermination » à organiser le second tour du scrutin même sans l’opposition. « Nous sommes déterminés à organiser ces élections le 20 mars (…) donc ce n’est pas le retrait (éventuel de Hama Amadou, candidat de l’opposition, actuellement emprisonné, ndlr) qui va nous empêcher », et « nous avons des délais constitutionnels à respecter et nous œuvrons pour éviter un vide institutionnel aux conséquences imprévisibles », avait déclaré le président de la Céni, Boubé Ibrahim, lors d’un point de presse à Niamey. Les candidats avaient jusqu’à 23 h 30 jeudi 10 mars pour déposer leur lettre de désistement au scrutin. Aucune lettre n’a été reçue de M. Amadou qui est emprisonné depuis novembre pour une affaire controversée de trafic d’enfants.
« Challenger empêché de monter sur le ring »
« Du fond de sa cellule, quelle campagne Hama peut-il battre ? C’est le challenger qui est empêché de monter sur le ring », a déploré son avocat. « Pendant ce temps, Issoufou sillonne le pays en avion et tient partout des meeting escorté par une armada de force de l’ordre », a-t-il souligné, dénonçant « une rupture d’égalité, d’équité et de chance » pour son client qui a mené la campagne du premier tour depuis sa cellule, sans pouvoir s’adresser publiquement à ses partisans.
Conformément à une alliance signée avant le premier tour, la COPA 2016, qui comprend les principaux opposants, s’est unie autour d’Hama Amadou, qui a obtenu 17,73 % des suffrages, lors du premier tour contre 48,43 % au président sortant Mahamadou Issoufou. En faisant des projections arithmétiques et en comptant sur des reports parfaits des scores du 1er tour, M. Issoufou l’emporterait largement au 2e tour.
La COPA, qui s’était montrée très critique du 1er tour, accusant le régime de « fraude », a notamment justifié le boycott par l’absence de « proclamation officielle » des résultats du 1er tour du 21 février, le non-respect de la durée de la campagne électorale et « l’iniquité de traitement entre les deux candidats ».
Plus de 7,5 millions d’électeurs s’étaient rendus aux urnes lors du premier tour dans ce pays sahélien de 18 millions d’habitants, parmi les plus pauvres de la planète et vivant sous la menace des groupes jihadistes. La campagne électorale pour le 1er tour du scrutin a été marquée par des violences entre partisans du président et opposants qui contestent la régularité du fichier électoral. Elle a été précédée de l’arrestation de personnalités et de l’annonce d’un putsch raté par le pouvoir.
Le président Issoufou avait alors espéré une victoire dès le 1er tour, assurant s’appuyer sur un bilan « réussi », une sécurité retrouvée et un programme « copié par l’opposition ». Celle-ci avait dénoncé la mauvaise gouvernance et souligné l’incapacité à enrayer la pauvreté dans le pays, classé parmi les derniers de la classe à l’indice de développement humain.
Comments
0 comments