Lydienne Yen Eyoum est libre depuis lundi soir. Arrêtée en janvier 2010, l’avocate française d’origine camerounaise purgeait une peine de 25 ans de prison pour détournement de fonds publics. Lundi 4 juillet, après six ans de détention, coup de théâtre, un décret du président camerounais a été lu à la radio d’Etat. Paul Biya lui a donc accordé une remise totale de la peine qui lui restait à purger. Le fruit d’une longue négociation diplomatique Paris-Yaoundé, notamment depuis un an.
Pour l’avocate Lydienne Yen Eyoum, l’équipe de François Hollande n’a pas démérité. Selon Me Caroline Wasserman, le président français et ses conseillers ont eu un vrai intérêt pour cette affaire, contrairement à Nicolas Sarkozy.
Le cas a notamment été évoqué lors de la visite de François Hollande en juillet 2015 à Yaoundé. A cette époque, la pression sur le Cameroun est forte. L’ONU vient de juger arbitraire la détention de la Française. Paul Biya fait alors un geste et déclare qu’il verra ce qu’il peut faire le moment venu. Pour autant, rien ne se passe.
« Nous avions eu beaucoup d’espoir, et puis les choses passant, la fin de l’année puis la fête nationale, sans voir de grâce présidentielle arriver, on commençait un peu à douter que ça se ferait un jour et je sentais d’ailleurs Lydienne de plus en plus désespérée d’une situation qui n’évoluait pas», raconte Jean-Yves Leconte, sénateur des Français de l’étranger, contacté par RFI.
Le gouvernement camerounais dément avoir cédé aux pressions de Paris
Selon lui, chaque autorité française reçue par Paul Biya évoquait l’affaire. Pour autant, le ministre de la Communication affirme que le Cameroun n’a aucunement cédé aux pressions de Paris. « Est-ce que vous avez une idée de la réaction que cette grâce suscite ? », lance Issa Tchiroma Bakary au micro de RFI.
« Nous avons une puissance qui doit en imposer au peuple camerounais souverain. Le président Biya s’est donc entouré de toutes les précautions pour que le peuple n’ait pas l’impression qu’il obéit au diktat de quelque puissance tutélaire que ce soit », considère-t-il.
Pour autant, la grâce n’efface pas la dette et la culpabilité de la Franco-Camerounaise. « Mme Eyoum doit aujourd’hui au Cameroun la somme de 1,153 milliard de francs CFA. Tout ce qui a été dit dans le cadre de son procès demeure : aux yeux des lois camerounaises, elle reste coupable. La grâce présidentielle n’efface pas la condamnation. Ces éléments vont se reporter dans son casier judiciaire », tempère le ministre de la Communication.
Hasard du calendrier ou pas, la Française a été libérée un an jour pour jour après la visite de François Hollande. Quoi qu’il en soit, pour l’avocat de Marafa Hamidou Yaya, maître Patrice Monthe, cette multiplication des pressions internationales est le signe de graves problèmes dans la justice camerounaise.
Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans notre justice […] Il faudrait qu’elle se reprenne en main et que l’on rende des décisions crédibles (Maître Patrice Monthe)
Comments
0 comments