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Détournement au programme maïs du MINADER : l’heure de jugement

Le tribunal criminel spécial (TCS) a interpellé ce 7 avril 2014 Bernard Njonga, président national du parti politique CRAC (Croire au Cameroun), pour être entendu sur l’affaire ACDICLe tribunal criminel spécial (TCS) a interpellé le 7 avril 2014 Bernard Njonga, président national du parti politique CRAC (Croire au Cameroun), pour être entendu sur l’affaire ACDIC (Association citoyenne de défense des intérêts collectifs) / PNAFM (Programme national d’appui à la filière maïs). L’interpellation fait suite à une plainte datant du 14 septembre 2009 et signée de lui alors président de ladite association, contre les responsables du PNAFM pour détournements de subventions allouées à la production du maïs en 2008. Cette affaire refait surface aujourd’hui, 8 ans plus tard, avec Mr Paul Sikapin alors coordonnateur dudit programme, en retraite depuis deux ans, interpellé et interné à la prison centrale de Kondengui à Yaoundé il y’a environ deux mois.

Pour la petite histoire, nous sommes en 2006 lorsque l’ACDIC remporte la victoire contre les importations de poulets congelés au Cameroun, matérialisée par la décision d’interdiction signée par le ministre de l’élevage au mois de mars. Alors que l’heure est à la réflexion sur la performance de la filière avicole nationale pour remplacer le poulet importé sur le marché, l’ACDIC constate le déficit de la production de maïs au Cameroun, qui entre à 70% dans la fabrication de la provende. « Etonnés, nous nous sommes tournés vers le Minader pour savoir ce qui est fait ou ce qui est envisagé face à ce déficit. C’est ainsi que nous découvrons le PNAFM qui était censé booster la production de cette céréale. Du coup nous nous y intéressons pour comprendre son fonctionnement et les raisons de son incapacité à satisfaire la demande. » Raconte Bernard Njonga. «Face au refus des responsables dudit programme de mettre à notre disposition toute informations y afférant, nous nous sommes tournés vers le fonds PPTE, financeur de ce programme qui nous a fourni les documents souhaités. Ce qui nous a permis, en appliquant la formule statistique de quotas, d’arrêter un échantillon des producteurs par région, lesquels ont fait l’objet d’une enquête, qui affirmait les faits de détournement et de corruption très graves au sein du PNAFM.» Ajoute-t-il.

On se souvient qu’une conférence de presse programmée le 3 décembre 2008 à Yaoundé pour rendre public les résultats de cette enquête, et interdite par l’autorité deux jours plus tôt, s’était tenue en quelques minutes non loin des locaux de l’ACDIC. Un livre blanc tiré à plusieurs exemplaires sur la crise du maïs et les malheurs de l’agriculture camerounaise avait été remis au public présent pour plus d’informations. Dès le lendemain, son contenu avait fait la une de tous les journaux. On n’oublie pas la manifestation citoyenne contre les détournements et la corruption au Minader organisée quelques jours plus tard, le 10 décembre 2008, par l’ACDIC, à l’encontre des autorités publiques. Ce jour, Bernard Njonga est arrêté, tabassé, enfermé, puis jugé et condamné plus tard à 3 mois d’emprisonnement avec sursis pendant 3 ans.

Quand la CONAC s’y mêle

«Un responsable de la CONAC qui s’était invité à la conférence de presse nous avait approché à la fin pour entrer en possession des résultats de l’enquêtes et autres documents. Plus tard le président de la CONAC fera appel à nous pour nous informer d’une contre-enquête que son institution conduira sur le terrain, en présence d’un membre de l’ACDIC.» Confie Bernard Njonga. D’après le rapport de la CONAC, une enquête a été menée du 22 décembre 2008 au 20 janvier 2009 dans 5 régions (Ouest, Sud-ouest, Littoral, Centre, Sud) auprès de 97 GIC. Il confirme non seulement les résultats de l’enquête de l’ACDIC, mais aussi désigne 47 fonctionnaires et délégués de GIC devant être entendus sur les faits de malversation identifiés. «Nous avons eu une copie de la lettre de transmission du dit rapport au ministre de l’agriculture datant du 15 juin 2009, qui recommandait la poursuite de ces fonctionnaires. C’est suite au silence du Minader trois mois après que nous décidons de porter plainte contre ces fonctionnaires et nous constituer en partie civile, en payant la caution de 150 000 frs CFA nécessaire à cet effet.» Précise l’ex président de l’ACDIC.

Ce rapport révèle que les fonctionnaires du Minader utilisent entre autre moyen de détournement les GIC fictifs, la réduction des subventions des producteurs, la vente des matériels de production. On y apprend que sur les 97 GIC enquêtés, 30 sont fictifs et ont capté plus de 17 millions de Fcfa sur plus de 49 millions débloqués par le gouvernement au profit des 97 GIC. Des 67 GIC identifiés, seule une vingtaine a fait un champ de maïs avec l’argent de la subvention. 95 GIC bénéficiaires déclarent n’avoir pas reçu l’intégralité de la subvention prévue. Sur plus de 1,2 milliards de Fcfa débloqués par le PNAFM pour la production du maïs dans les cinq régions enquêtées pour les périodes 2006, 2007 et 2008, plus de 341 millions ont été détournés. Le reste, soit plus de 611 millions de F CFA, a effectivement été perçu par des bénéficiaires connus, mais une grande proportion de cette somme a été utilisée à autre chose que la production du maïs (achat par les bénéficiaires de motocyclettes, résolution des problèmes familiaux, etc).

Quelques cas sur le terrain rapportés par la CONAC

– Des GIC bénéficiaires de la subvention dont les activités déclarées ne prévoient pas la production agricole en général et encore moins la production de maïs. Exemple : GIC ARTO (Artisanes de l’Ouest) dans le Département de la Mifi dont le Délégué a affirmé que les activités actuelles se limitent à I ‘exploitation d’un moulin offert par le Projet Telefood. Pourtant, le GIC a bel et bien reçu en 2008 la subvention en espèces destinée à la production du maïs. Ces fonds ont été distribués aux membres qui en ont usé à leur guise.

– Des GIC non sélectionnés par le Comité départemental mais dont le nom apparaît sur la liste des bénéficiaires, introduits par la Coordination nationale et qui ne se retrouvent pas dans les localités où ils sont pourtant annoncés sur du papier.

– Les GIC qui apparaissent sur la liste des bénéficiaires finaux d’un département, dont les noms ne diffèrent que d’une lettre de ceux des GIC réels figurant sur la même liste, mais qui sont introuvables sur le terrain. C’est le cas des GIC ABIEDEL et GIC ABIELEL à Melong dans le Moungo. Le GIC ABIELEL existe bel et bien et le Délégué de ce GIC affirme avoir perçu sa subvention, alors que le GIC ABIEDEL n’existe nulle part, et d’après les recoupements de la CONAC, cet autre GIC a également perçu la subvention.

– Deux GIC ayant bénéficiés des subventions pour créer 4 hectares de maïs à Nkoldongo (quartier surpeuplé de Yaoundé)

Jusqu’où ira cette affaire ? Est-on en droit de se demander. Dans tous les cas, le président du CRAC émet deux réserves: «Premièrement le fait que cette histoire ressorte 8 ans après fait perdre l’effet d’exemple que ça aurait eu sur les autres coordonnateurs de programme dudit ministère, vu que certaines personnes entendues aujourd’hui ne sont pas connus des responsables actuels du Minader. Deuxièmement, le coordonnateur du programme maïs, pour ce qui concerne ces faits de détournement n’est qu’un menu fretin. Les vrais responsables ayant été la plus haute hiérarchie du dit ministère: le Secrétaire Général et autres conseillers, voir le ministre qui donnait des instructions à ce gestionnaire de projet. Ce procès quoi qu’on dise est celui d’un système d’un mode de gestion qui a encore cours au sein de ce ministère. Le TCS nous aidera-t-il à aller jusqu’à ce stade?» S’interroge-t-il.

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