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Cameroun : des ONG portent plainte contre l’État pour dénoncer les coupures Internet en zones anglophones

C’est la première fois qu’un État est poursuivi pour des coupures de réseau Internet. Les ONG qui interviennent dans le dossier espèrent créer un précédent, alors que plusieurs pays africains ont eu recours à cette pratique ces derniers mois pour étouffer les mouvements de contestation.

Une plainte a été déposée le 15 janvier contre l’État camerounais devant le Conseil constitutionnel, pour contester les multiples coupures d’Internet dans les régions anglophones qui durent depuis un an.

L’État du Cameroun, le ministère des Postes et des Télécommunications ainsi que Camtel, la société nationale de télécommunication sont nommément cités dans la lettre adressée à l’instance juridique.

Liberté d’expression

Cette plainte a été initiée par une ONG camerounaise, le Réseau de Défenseurs des Droits Humains de l’Afrique Centrale (Redhac). « Nous avions déjà sollicité la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples à travers une plainte déposée en avril 2017 au moment de la première grande coupure. La recevabilité de cette nouvelle plainte ne peut pas être contestée, le Cameroun est signataire de plusieurs textes internationaux qui doivent garantir la liberté d’expression ainsi que celle de s’informer. Deux droits fondamentaux que ces restrictions violent », explique Maximilienne Ngo-Mbe, directrice exécutive de l’ONG.

Faire en sorte que les coupures d’Internet soient reconnues comme une violation des droits constitutionnels des Camerounais

Après une première coupure de 93 jours entre janvier et avril 2017, une seconde mesure visant à restreindre l’accès aux réseaux sociaux, sur au moins deux des quatre principaux opérateurs, a été mise en place le 29 septembre 2017 dans les régions anglophones du nord-ouest et du sud-ouest du pays. Une mesure adoptée par le gouvernement deux jours avant une déclaration d’indépendance symbolique des séparatistes actifs dans cette partie du pays, pour tenter d’étouffer la contestation sur les réseaux.

Regain de tensions

Depuis novembre 2016, la minorité anglophone, qui représente environ 20 % des 22 millions de Camerounais, proteste contre ce qu’elle appelle sa « marginalisation », notamment dans l’enseignement et la magistrature. Certains anglophones exigent le retour au fédéralisme, tandis qu’une minorité réclame la scission du Cameroun. Deux scénarios que refuse le gouvernement de Yaoundé, qui s’est engagé dans un bras de fer avec ceux qu’il qualifie de « terroristes ».

Dans le même temps, le président Paul Biya et les autorités camerounaises ont accru la pression sécuritaire dans ces régions. Une escalade qui fait craindre aux experts un risque « d’insurrection armée ».

La tension est montée d’un cran depuis la déclaration d’indépendance symbolique de l’Ambazonie. 19 militaires et policiers ont été tués depuis novembre dans les deux régions anglophones. La crise pourrait prendre un nouveau tournant avec l’extradition vers le Cameroun, lundi 29 janvier, des séparatistes arrêtés au Nigeria au début du mois.

Créer un précédent

Le Redhac a été rejoint sur le dossier par deux ONG, Internet sans frontières (ISF) et Access Now, qui interviennent, depuis le 19 janvier, pour apporter leur expertise juridique et recueillir des témoignages sur place.

Avec les élections qui approchent et dans un contexte aussi tendu, ce ne sera pas évident de faire aboutir cette plainte

Selon Internet sans frontières, ces coupures auraient créé environ 39 millions de dollars de pertes pour l’économie camerounaise. À Buéa, un des fiefs de la contestation, les nombreuses start-up installées dans cette ville du sud-ouest du Cameroun, surnommée la « Silicon Mountain », ont notamment souffert de ces restrictions.

« C’est la première fois qu’un État est poursuivi pour avoir coupé Internet. Le but de ce dossier est aussi d’établir un précédent, en faisant en sorte que les coupures d’Internet soient reconnues comme une violation des droits constitutionnels des Camerounais », explique Melody Patry d’Access Now, citant les exemples des gouvernements du Togo et de la RDC, qui ont régulièrement recours à cette pratique lors des rassemblements de l’opposition.

« Cette réponse disproportionnée de la part du gouvernement camerounais pour faire taire la contestation doit être condamnée. La Cour a une opportunité de faire jurisprudence pour les futurs victimes de coupures d’Internet. Mais nous sommes conscients qu’avec les élections qui approchent et dans un contexte aussi tendu, ce ne sera pas évident de faire aboutir cette plainte », conclut Maximilienne Ngo-Mbe du Redhac.

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