Lentement mais inexorablement, le mouvement de contestation brutalement réprimé contre le président Pierre Nkurunziza se mue en une insurrection armée. Dans une Afrique des Grands Lacs à l’histoire jalonnée de massacres et de mouvements armés, « une nouvelle rébellion naît sous nos yeux », s’alarme un analyste burundais
La situation au Burundi « est en train de dégénérer rapidement en un conflit armé qui pourrait avoir des répercussions dans toute la sous-région, avec un risque d’atrocités de masse », a solennellement mis en garde, lundi 10 août, Ivan Simonovic, le secrétaire général adjoint du Haut-commissariat aux droits de l’homme.
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Encore latente, « la guerre est en pratique déjà déclenchée », estime Innocent Muhozi, figure de la société civile burundaise. La capitale a remplacé comme champ de bataille les collines verdoyantes où se déroula la terrible guerre civile qui déchira le pays de 1993 à 2006 entre une armée dominée par la minorité tutsi et le peuple paysan hutu.
Un climat de peur alimenté par les combats nocturnes
Presque chaque nuit, Bujumbura résonne de rafales d’armes automatiques et de détonations de grenades. Le bilan de ces violences, qui s’intensifient inéluctablement, reste méconnu. Voitures incendiées et cadavres sont retrouvés au petit matin. Quartiers bouclés, rafles d’opposants présumés et perquisitions par la police se multiplient la journée.
Après être difficilement parvenu à étouffer les manifestations contre lui, au terme d’une répression implacable ayant fait une centaine de morts, le président Pierre NKurunziza a finalement été réélu fin juillet à la tête du pays. Une réélection lors d’un scrutin contesté qui n’a pas apaisé les tensions.
Les policiers hésitent dorénavant à rentrer dans les quartiers contestataires, où ils sont pris pour cible. « La nuit venue, les quartiers se barricadent, avec patrouilles d’hommes armés et tours de garde par des groupes parfaitement organisés », explique un habitant, « les kalachnikovs sont là, les jeunes se disent bien équipés et attendent les policiers de pied ferme ».
L’assassinat le 2 août, dans une expéditive attaque à la roquette, de l’homme fort de l’appareil sécuritaire, le général Adolphe Nshimirimana, a marqué une nouvelle escalade. Le parti présidentiel CNDD-FDD a dénoncé une campagne d’élimination ciblée de ses responsables.
Le voisin rwandais pointé du doigt par le régime
« Avant les élections, le pouvoir accusait les manifestants pacifiques d’être des insurgés. Ils le sont devenus ! », ironise l’analyste : « Après l’exécution d’Adolphe, tout le monde attend leur prochain coup. On ne sait pas où ils vont frapper, mais personne ne doute que ça va faire mal »
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