Le dimanche étant un jour prisé autant par les mariages que par les élections, il fallait bien s’attendre à l’espèce d’embouteillage électoral que l’Afrique a servi hier. Quatre élections d’envergure le même jour ! Un premier tour au Congo, deux seconds tours au Bénin et au Niger, et un référendum au Sénégal. Trois en Afrique de l’ouest et une élection dans la partie centrale du continent. Mais les éléments de ressemblance entre les quatre rendez-vous politiques se limitent bien au jour auquel ils ont lieu. Pour le reste, chacun des scrutins est le reflet d’une réalité bien singulière sur le plan politique notamment. Chacun traduit à la fois le niveau d’évolution de l’expérience démocratique du pays concerné, la nature des rapports entre les camps politiques en présence et les aspirations que la classe politique, dans son ensemble, nourrit pour le pays.
De loin, le cas du Congo-Brazzaville est le plus inique. C’est le symbole d’une Afrique qui marche à reculons. L’incarnation d’un pays dont la marche et le destin tiennent à la volonté et au désir exclusifs d’un homme, Denis Sassou Nguesso. Après un cumul de 32 ans à la tête du Congo, le président, ne voulant pas se lester des délices et autres privilèges liés à l’exercice du pouvoir, décide de tripatouiller la constitution pour s’offrir le pouvoir à vie. Paradoxalement mais ouvertement soutenu par François Hollande, il n’eut aucun mal à museler son opposition pour parvenir au simulacre d’élection d’hier. Convaincu de sa toute-puissance et comme si le pays était sa propriété privée, il s’offre même l’ultime luxe de mettre le Congo dans un black-out qui prive le monde de savoir comment les choses se sont passées.
Heureusement qu’à côté de cette Afrique rendue ridicule par ce type de dirigeants, il y a celle symbolisée par le Bénin. Un pays où le président sortant, Boni Yayi, à l’issue de ses deux mandats, a tranquillement rendu le tablier. Un pays où le candidat du pouvoir, Lionel Zinsou, en dépit de ralliements de taille, a été contraint au second tour qu’il n’est pas non plus assuré de remporter. De fait, le Bénin est le seul pays où l’élection d’hier gardait tout le suspens caractéristique d’une compétition libre, crédible et respectueuse des règles du jeu démocratique.
Entre ces deux extrêmes, on a le Niger dont c’était également le second tour. Mais à la différence du Bénin, les choses étaient pliées d’avance et l’environnement d’ensemble pollué par des querelles entre pouvoir et opposition, sur fond d’accusations de fraude et de hold-up électoral. Le cas nigérien était également singulier, en ce sens que le challenger Mahamadou Issoufou, a passé la journée électorale dans son lit d’hôpital à Paris, après avoir vécu le premier tour dans sa cellule de la prison de Filingué. Dans un tel contexte, le mot d’ordre de boycott lancé par les leaders de la Coalition pour l’alternance (Copa2016), n’était certainement pas de nature à arranger les choses.
Enfin dans ce tableau, le cas Sénégal fait figure d’exception, en ce sens qu’il ne s’agissait que d’un référendum. Le mandat de Macky Sall n’étant pas en jeu, l’enjeu était de moindre envergure. Même si pour lui, il s’agissait tout de même d’une sorte de test à mi-mandat. Encore que la position des partisans du « Non » n’était pas particulièrement compréhensible. Car s’il est vrai qu’en triomphant, ils administreraient un cinglant camouflet au président sénégalais, il se trouve que cette même victoire de leur part, empêcherait le Sénégal de ramener la durée de son mandat de sept à cinq ans. Ce qui dans la perspective d’un second bail pour Macky Sall ne serait pas nécessairement une mauvaise chose. On pourrait presque croire que le débat n’a guère dépassé le niveau intrinsèque des rivalités politiques.
Boubacar Sanso Barry
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