Le 19 septembre dernier, Blade Nzimande, le ministre de l’Enseignement supérieur, a annoncé une hausse de 8 % des frais de scolarité dans les universités publiques en 2017. Cette déclaration a immédiatement suscité des mouvements de protestation dans plusieurs villes du pays, notamment au Cap et à Johannesburg, qui se poursuivent actuellement.
« Les étudiants se sont déshabillées pour dire aux policiers d’arrêter de leur tirer dessus »
Bongani Ncube, 19 ans, étudie la psychologie au sein de l’université du Witwatersrand. Il se trouvait sur le campus-est de l’université lorsque les affrontements ont éclaté entre la police et les étudiants mardi.
Lundi matin, nous avons reçu un email de l’université nous indiquant de retourner en classe, puisque les cours avaient été suspendus le 20 septembre dernier, au lendemain de l’annonce du ministre. Il était également écrit que nous n’avions pas le droit de nous déplacer en groupe, car cela reviendrait à manifester aux yeux de l’université.
Malgré tout, plusieurs centaines d’étudiants se sont rassemblés sur le campus mardi matin. Des policiers ont alors commencé à tirer dans leur direction avec des balles en caoutchouc, du gaz lacrymogène et des grenades incapacitantes. Certains étudiants ont donc pris la fuite, mais beaucoup ont également répliqué en leur jetant des pierres. [Un véhicule de la police a également été renversé, NDLR.]
More police violence #Wits pic.twitter.com/6WX8Zfm8Q0
— raeesa pather (@raediology) October 4, 2016
Par ailleurs, trois filles se sont mises torses nus. Pour elles, c’était une manière de leur dire : « Arrêtez de nous tirer dessus : nous sommes juste des personnes humaines, nous sommes désarmées, nous ne faisons rien de mal. » Ça a plutôt bien fonctionné, puisque la police a arrêté de tirer.
Pleading for the bullets to stop. #Wits #fees2017 pic.twitter.com/WoXTaalyrK
— Lirandzu Themba (@LirandzuThemba) October 4, 2016
Woman protesters undress to send a message across.#Wits #Fees2017 pic.twitter.com/OIYDH7ASux
— Lirandzu Themba (@LirandzuThemba) October 4, 2016
« Les étudiants sont assez divisés sur la question de la hausse des frais de scolarité »
Bongani Ncube poursuit :
Cela fait deux semaines que la colère gronde concernant la hausse des frais de scolarité prévue à la rentrée 2017, alors qu’ils sont déjà très élevés. En ce qui me concerne, j’ai dû payer 100 970 rands cette année [soit 6 549 euros, NDLR]. Pour cela, mon père a dû emprunter de l’argent à la banque. Mais tout le monde ne parvient pas à obtenir un prêt, donc beaucoup de jeunes ne peuvent tout simplement pas étudier à l’université, ce qui alimente les inégalités.
Le problème, c’est que les étudiants sont assez divisés sur le sujet actuellement, alors qu’il faudrait qu’ils soient unis. D’une part, certains étudiants veulent continuer à aller en classe, notamment ceux qui n’ont pas de problèmes d’argent, c’est-à-dire plutôt les Blancs. Je trouve que c’est assez égoïste de leur part. D’autre part, certains étudiants – les Noirs généralement – veulent poursuivre le mouvement. Ça les énerve donc que certains soient retournés en classe lundi et mardi.
These are the people who can afford to be in class #Wits Mac book life pic.twitter.com/La2rCWXTT9
— Bongani (@Bongs_Mdu) October 4, 2016
Par ailleurs, certains boursiers veulent également continuer à aller en classe, car ils ont peur de perdre leur bourse l’année suivante s’ils ne valident pas leur année. Ce risque est réel puisque l’année pourrait être perdue si les cours sont suspendus trop longtemps. Enfin, beaucoup d’étudiants n’osent pas manifester car ils ont peur des violences.
En 2015, un vaste mouvement de protestation contre la hausse des frais de scolarité avait déjà secoué de nombreux campus sud-africains, ce qui avait contraint le gouvernement à geler leur augmentation pour 2016. Une commission avait alors été mise en place afin d’étudier la question du financement des études à l’université.
Chloé Lauvergnier
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