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Comment Vincent Bolloré finance son projet fou en Afrique

Vincent Bolloré déclare à Challenges qu’il n’introduira pas en Bourse sa société de chemin de fer, qu’il financera sur ses propres fonds. 

Vincent Bolloré s’est lancé dans un pari fou: la construction d’une boucle ferroviaire de 3.000 kilomètres, reliant cinq pays d’Afrique de l’Ouest entre Abidjan à Cotonou. Un défi logistique et financier pour un projet pharaonique, qui a été stoppé dans les années 1930. Mais cette boucle ferroviaire est contestée, avec deux procédures judiciaires, lancées par des proches de Michel Rocard, l’ex Premier ministre et par l’homme d’affaires béninois Samuel Dossou, qui affirment avoir des droits accordés par les Etats. A cause de ces procédures et de la grande incertitude sur la rentabilité d’un tel projet, Vincent Bolloré nous confie qu’il ne fera pas appel au marché pour financer cette boucle ferroviaire. Alors qu’une introduction en Bourse de sa société de chemin de fer était prévue au printemps. Entretien exclusif.

Pourquoi se lancer dans ce projet fou de construction de la boucle ferroviaire ?

Cela fait plus de 80 ans qu’on parle de cette ligne de chemin de fer. Si nous avons décidé de le faire, et d’investir près de 3 milliards, c’est parce que nous croyons à l’Afrique. Nous avons foi dans ce continent où nous sommes présents depuis plus de cinquante ans. Et nous sommes les seuls à vouloir financer cette boucle. Il y a beaucoup de rêveurs mais qui ne sont pas prêts à apporter les fonds nécessaires. Nous avons le courage de le faire sur un horizon très long, de plus de 20 ans. Cela exige beaucoup d’audace, d’autant plus qu’à la demande des Etats, nous avons démarré très vite la construction, parfois sans concession. Nous avons pris un risque car notre investissement n’était pas protégé par une convention, en cas de changement politique.

14749085Procédures judiciaires, chute du prix des matières premières … Votre projet est-il menacé ?

Absolument pas. Un projet d’une telle ampleur, dans des zones pas toujours très sûres, rencontre forcément des obstacles. Il ne faut pas croire que cela va se passer sans anicroche. Nous avons très bien réussi les premiers pas, notamment la construction du tronçon de 140 kilomètres entre Niamey et Dosso, au Niger. Même s’il a fallu modifier le tracé et passer dans des zones marécageuses, ce qui nous a fait perdre trois mois.

Au Bénin, les travaux sont stoppés à cause d’une décision de justice…

C’est inhérent à toutes les grandes aventures, les canaux de Panama et de Suez, les grandes voies de chemin de fer, en Russie ou en Amérique. Il y a toujours des contestations. Nous suspendons les travaux en attendant la fin des procédures judiciaires. Mais si le projet est reculé de trois, six ou neuf mois, cela n’enlève rien à notre détermination.

Allez-vous discuter avec les proches de Michel Rocard et l’homme d’affaires Samuel Dossou, qui jugent votre projet illégal?

Non. Nous ne discutons qu’avec les Etats qui nous ont accordé la concession. Et s’il y a des réclamations, c’est avec les Etats que cela doit se régler.

Pouvez-vous financer seuls un tel investissement?

Nous investissons massivement dans des secteurs où personne n’ose aller. Cela a été le cas dans la voiture électrique et la batterie. Le groupe Bolloré en est capable grâce à son actionnariat familial, qui le protège du diktat des marchés boursiers.

Vous aviez prévu d’aller chercher des fonds en bourse pour financer ce projet …

Non, il n’y a pas de projet d’introduction en Bourse. En Assemblée générale, j’avais évoqué cette possibilité. Mais je n’ai pas lancé le processus. Nous finançons sur nos fonds propres.

Avec la baisse du prix du pétrole, un certain afro-pessimisme est de retour. Etes-vous inquiet ?

Depuis des décennies, des observateurs vous expliquent que l’Afrique est perdue. Il y a 18 mois, avec l’épidémie Ebola, elle devait s’effondrer. Aujourd’hui, l’épidémie est terminée et plus personne n’en parle. Alors, c’est le cours du pétrole qui leur fait peur ; demain, ce sera peut-être une invasion de sauterelles… ! Rien n’arrêtera le développement de ce continent. Grâce à Internet, ses habitants peuvent mieux apprendre, se soigner et avec le développement du solaire, ils vont avoir de l’énergie électrique.

Les batteries de vos Autolib vont équiper vos « Bluezone ». Quelle est votre ambition ?

En Afrique, le téléphone portable a rapidement supplanté le téléphone fixe. Ce sera la même chose dans l’énergie. On ne fera pas de centrales avec réseaux de distribution. Et comme y a beaucoup de soleil, vous aurez des centrales solaires avec du stockage. Grâce à l’énergie électrique, vous pouvez avoir de l’eau potable, de la lumière et aussi de la communication, de la culture. Vivendi a le premier studio européen (Studio Canal), le numéro un mondial de la musique (Universal Music)…On va donc apporter en Afrique ces contenus à travers ces Bluezone. Et Simon Gillham, le patron de Vivendi Village, va créer avec Canal Olympia près d’une centaine de salles de cinéma spectacle de 500 à 5000 places.

Cette batterie est-elle adaptée ?

Sur les Autolib, nos batteries fonctionnent depuis six ans sans perte de puissance. En Afrique, si on démontre qu’elles peuvent tenir dix ans, leur développement sera fulgurant. Nous avons aujourd’hui une dizaine de Bluezone. On peut en avoir 100 ou 1 000 dès que la « cyclabilité » de nos batteries sera confirmée.

Ports, chemin de fer, médias : votre position dominante inquiète en Afrique…

C’est une blague ! On a été dominant quand on était les seuls à investir. Mais aujourd’hui, le monde entier vient en Afrique, chinois, indiens, américains… Et c’est tant mieux. Notre position va se réduire.

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