Lors de sa visite au Cameroun, Mme Michaelle Jean, la Secrétaire Générale de l’Organisation Internationale de la Francophonie a rendu visite aux membres du Conseil Electoral d’Election Cameroon(ELECAM) et a déclaré : « Les experts d’ELECAM peuvent aujourd’hui venir en renfort dans d’autres pays pour l’observation des élections. Je suis ravie de savoir que la Francophonie a participé à la prise en charge et la formation de tous ces experts… ». Satisfecit d’autant suspect qu’il s’appuie sur un simple coup de tête ou de foudre et non sur l’appréciation et évaluation objective et méthodique d’exploits déjà accomplis dans l’organisation des élections au Cameroun pour mériter ainsi le titre « d’experts » capables d’aller en renfort vers d’autres pays. Provocation ou simple autoglorification de constater que « la Francophonie a participé à la prise en charge et à la formation de « tous ces experts » dont l’expertise et le savoir-faire électoral sont ostensiblement affichés sur les visages. Sacrée Michaelle ! Ce témoignage de satisfaction qui semble aller au-delà d’un simple compliment diplomatique sans lendemain est une insulte grave au peuple du changement qui se bat au Cameroun depuis plus de trois décennies pour une véritable Commission Electorale Indépendante.
Cet acte qui n’est manifestement pas anodin est d’autant plus révoltant et indécent que tout le monde se souvient que ELECAM est un bébé qui, après trop d’années de gestation a été empoisonné par le liquide amniotique dans lequel il baignait et est arrivé au monde handicapé par une malformation congénitale irréversible qui la suit au fil des élections: au lieu d’être neutres comme la loi l’avait voulu, ses membres ont été presque tous choisis parmi les militants les plus fanatiques et les plus zélés du parti au pouvoir, les frappant ainsi d’un défaut rédhibitoire les privant ab initio de toute possibilité d’accomplir dans les normes requises le travail que les Camerounais espéraient d’eux. Michalelle Jean le savait-elle ? S’est-elle renseignée sur la composition et le fonctionnement d’un Organe aussi vital pour le maintien de la paix dans notre pays ? Que savait-elle d’ailleurs du Cameroun avant son élection ? Qu’en sait-elle après ses quatre jours passés ici où, pour des raisons évidentes, elle n’a vu que ce qu’on a bien voulu qu’elle voie et rencontré que ceux qu’on a bien voulu qu’elle rencontre ?
Sait-elle qu’ELECAM est un Organe aux ordres et qu’après avoir obstinément refusé de toiletter le fichier électoral avant l’élection présidentielle d’octobre 2011, M. Fonkam Azu, le Président de son Conseil, est revenu après les résultats qui avaient déjà proclamé son champion vainqueur nous confesser qu’il s’est enfermé pendant deux semaines et a découvert que le fichier querellé comportait 500 000 doublons ? Pourquoi avait-il refusé de le faire avant avec la participation des autres parties prenantes ? N’y avait-il effectivement que 500 000 doublons ? Les Camerounais sauront finalement toute la vérité lorsque dans une correspondance adressée le 26 septembre 2011 par le Secrétaire Général des Services du Premier Ministre d’alors, Jules Doret Ndongo au ministre des Finances Essimi Menye, ils apprendront que «Dans le cadre de l’élection présidentielle de 2011, le Président de la République avait marqué son Haut Accord pour la mise à disposition du Conseil Electoral, instance composée de 17 membres 300.000.000 de Fcfa et aussi 3.000.000.000 Fcfa à ELECAM, ainsi qu’aux autres organes en charge des élections pour la: «Préparation de l’élection présidentielle de 2011». Madame Michaelle le sait-elle à qui elle présente ses félicitations ? Le fait-elle en son nom propre ou au nom de la Francophonie ?
A-t-elle rendu visite à Elecam de son propre chef ? N’y a-t-elle pas été envoyée pour légitimer et donner une éventuelle substance à un Organe controversé qui constitue la plus grande pomme de discorde opposant les Camerounais et le pouvoir ? Mais, il faut peut-être la comprendre. Elle est au Cameroun sur invitation d’u homme, le Président de la République qui l’a soutenue pour son élection inespérée à la tête d’une francophonie qui ne s’est jamais beaucoup embarrassée des considérations démocratiques dans les pays francophones. Elle est venue au Cameroun, non pas pour les Camerounais, mais pour une opération de marketing politique et n’avait aucun intérêt à aborder des sujets délicats, au risque de parler de pieds morts dans la maison d’un paralytique et de « verser du sable dans son tapioca ».
La réception à elle organisée était au-delà de ses espérances et de toute imagination, même en délire. Devenue euphorique, elle pouvait présenter un toast en anglais tout en défendant la langue française, et se sentir dans le meilleur des mondes possibles où il n’y a pas de Boko Haram, ni de corruption, où la démocratie fonctionne à merveille avec alternance régulière, où tout le monde est heureux. A force de vouloir caresser son hôte dans le sens du poil, aux embouteillages routiers et au manque à gagner que sa visite inutile et folklorique nous a causés, elle a fini par jeter encore plus d’embûches et d’encombrements sur le chemin déjà tortueux de notre processus démocratique et électoral. Nous n’oublierons jamais que la francophonie ne sera jamais autre chose que le bras séculier de la Françafrique et du néocolonialisme. C’est pourquoi, pour dîner avec le diable, nous utiliserons toujours une très longue cuillère. Autour de moi, j’entends déjà les thuriféraires du régime se gargariser de ce que la Francophonie a félicité Elecam et partant, confirmé la validité des élections qu’il a jusqu’ici organisée. Je souhaite que le jour où la même Francophonie ou une autre Organisation internationale dira que notre président est malade, qu’il s’éternise au pouvoir ou portera un jugement qui ne va pas dans le sens de leurs attentes, ils ne parleront ni de déstabilisation ni de complot.
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