Le Cameroun, représenté par son ambassadeur en Guinée équatoriale, a affirmé ce jeudi, à Malabo, que la zone Cemac regorgeait d’assez de ressources naturelles ainsi que de suffisamment de projets d’envergure pour alimenter deux Bourses, quitte à ce qu’elles soient “spécialisées”.
C’est d’une voix très mesurée et volontairement didactique, lunettes de lecture à monture fine vissée sur le nez, que Lazare Mpouel Balla a apporté ce matin la position du Cameroun vis-à-vis des propositions du rapport du cabinet Roland Berger sur “le potentiel du marché financier régional de l’Afrique centrale et les mesures d’accompagnement”, rendu public hier durant le Forum international sur le développement du marché financier de l’Afrique centrale, qui s’achève ce jeudi à Malabo.
Le diplomate camerounais, qui représentait le ministre des Finances Alamine Ousmane Mey, a rejoint, dans son intervention, plusieurs des critiques soulevées dans le rapport de Roland Berger et par les intervenants durant ce débat. Notamment en ce qui concerne la méconnaissance par le grand public et nombre d’opérateurs économiques des mécanismes et des règles des marchés financiers, les réticences de beaucoup d’entrepreneurs à communiquer sur leurs résultats financiers et à ouvrir leurs capitaux.
Sur le point central du rapport de Roland Berger, à savoir l’urgence d’une unification du secteur boursier dans la zone Cemac qui compte aujourd’hui deux Bourses – la Douala Stock Exchange et la Bourse des valeurs mobilières de l’Afrique centrale (BVMAC) de Libreville – les positions exprimées par les représentants des gouvernements du Gabon et du Cameroun ont semblé assez antagoniques.
Dans son intervention, Chantal Abengdang Mebale, ministre déléguée auprès du ministre de l’Économie du Gabon, a rappelé que Libreville “a fait ce qu’il fallait faire pour encourager le développement d’un marché financier en Afrique centrale”, par exemple via des mesures fiscales incitatives. Une façon à peine voilée d’indiquer que le Gabon a déjà réalisé sa part de sacrifice et n’entend pas en consentir d’autres à l’heure actuelle.
« Se faire violence » pour parvenir à un accord
En guise de réponse, Lazare Mpouel Balla a rappelé que “le Cameroun s’est engagé politiquement pour le développement du marché financier régional”. Le représentant camrerounais a indiqué que Douala “prend acte des propositions pertinentes de ce rapport [qui] seront discutées dans le cadre des mécanismes de prise de décision de la Cemac”. Les conclusions de l’étude devraient être examinées par les experts gouvernementaux, puis discutées successivement par les ministres des Finances et les chefs de l’État de la région.
Sans préjudice quant aux conclusions éventuelles des discussions à venir au sein des instances régionales, l’ambassadeur camerounais a toutefois indiqué qu’à l’heure actuelle, “l’avis du Cameroun est que si les mécanismes de base et les mesures qui peuvent servir à plus de connaissances sur ce qu’est le marché financier sont prises, il y a assez de potentiel économique, assez de ressources et assez de projets pour plus d’une Bourse en Afrique centrale!”. Quitte à ce qu’elles soient spécialisées sur des segments différents, avec l’une des deux consacrées au marché alternatif, aux PME disposants d’un capital inférieur à 200 millions de F CFA avec des exigences comptables moins complexes, a indiqué le représentant camerounais.
“Il faut qu’on se fasse violence, pour arriver à nous entendre”, a insisté à la tribune Habiba Sahoulba. Pour la secrétaire d’Etat tchadienne aux Finances, les pays de la région “ne vont pas choisir, mais compter sur la hauteur de vue, le bon sens et la grandeur d’esprit de nos pays frères [le Gabon et le Cameroun, Ndlr] pour qu’ils s’entendent pour le bien de tous”.
Joël Té-Léssia
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