Le rapport de l’OMS sur la dangerosité de la charcuterie fait encore réagir. Un sociologue suisse s’étonne.
Au lendemain de la publication du rapport alarmiste de l’OMS sur la charcuterie et la viande cancérogènes, le sociologue Francesco Panese s’étonne de la communication de l’agence onusienne et du manque de recul des médias. Dans une interview à la RTS, il estime que l’annonce a rencontré un écho «disproportionné».
En se basant sur plus de 800 études, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), l’agence cancer de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), a classé la viande transformée, essentiellement la charcuterie, dans la catégorie des agents «cancérogènes pour l’homme». Les viandes rouges ont été classées comme «probablement cancérogènes».
Evénement disproportionné
Interrogé dans le Journal du matin, le professeur d’études sociales de la médecine et des sciences à l’Université de Lausanne relativise les conclusions des chercheurs sans contester la validité de la méthode utilisée: «Cet événement est totalement disproportionné par rapport à la valeur intrinsèque des résultats».
Pour Francesco Panese, la recherche scientifique doit surtout chercher à identifier des risques et c’est ensuite aux organismes de santé publique de prendre des mesures en conséquence. Les autorités ont été court-circuitées, selon ce spécialiste de l’histoire de la médecine et de la santé publique.
«Moralisation de la santé»
Il déplore la communication de l’OMS, mais également le manque de recul des médias: «On s’est adressé directement au lecteur, à l’auditeur, au consommateur, bref au citoyen-mangeur, pour finalement l’alarmer. Et ça, c’est une dérive», a-t-il dénoncé sur les ondes de la RTS.
«On est dans un système où on alarme les gens, on crée un buzz assez important qui peut avoir lui-même une certaine toxicité», affirme le professeur. Il évoque une «société de l’inquiétude qui ne perd pas une occasion pour se mettre fantasmatiquement en danger». Et «l’hygiène alimentaire occupe un niveau extrêmement haut dans les inquiétudes ordinaires des gens», ajoute-t-il.
M. Panese observe de manière générale une «moralisation de la santé», avec ses conséquences: «la santé absolue est devenue une norme sociale et une norme symbolique, qui agit de manière très forte pour orienter nos comportements».
Enfin, pas question pour lui de comparer viande et cigarette. «Derrière la cigarette, il y avait des groupements industriels très actifs», relève-t-il. «On ne peut pas dire que la confrérie des bouchers a été aussi puissante d’un point de vue historique et sociologique».
(nxp/ats)
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