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jeudi, mars 28, 2024
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Exploitation de l’or au Cameroun : vives tensions entre Camerounais et Chinois

L’exploitation industrielle de l’or dans l’est du Cameroun provoque de fortes tensions entre populations locales et exploitants chinois, accusés d’assassinat, d’accaparement des terres et de corruption dans un pays où l’industrie aurifère n’est pas encadrée légalement.

Début avril, selon l’ONG Forêts développement rural (Foder), quatre entreprises minières ont été interdites d’exploitation dans l’est du Cameroun, dont la société chinoise Lu et Lang, bien implantée dans la région.

En novembre, un employé de cette entreprise avait abattu un Camerounais qui cherchait de l’or sur la parcelle dont elle revendique la propriété.

« Les villageois se sont révoltés et ont tué à leur tour le Chinois » à coup de cailloux, explique Narma Ndoyama, agriculteur à Longa Mali, petit village de cette région aurifère du Cameroun où est implantée l’entreprise.

Rachat « pour des miettes »

La compagnie minière a repris ses activités sur le site de Longa Mali après un bref arrêt. Mais la tension est loin d’être retombée dans la zone. Les Chinois « ont tué mon fils, mais ils n’ont rien fait (pour moi). Ils travaillent et personne ne les inquiète », fulmine Philippe Balla, père de la victime.

« Il y a des conflits en permanence entre Camerounais et Chinois » autour de l’exploitation de l’or dans l’est du Cameroun, affirme encore M. Ndoyama.

Les habitants pestent contre le rachat « pour des miettes » de nombreuses terres autrefois agricoles, selon Michel Pilo, chef du village de Mali, qui englobe Longa Mali.

« Ils dévastent nos champs », accuse-t-il, affirmant qu’une parcelle qui vaudrait 500.000 francs CFA (750 euros) est rachetée à 80  000 francs (120 euros).

Et « vous ne pouvez pas vous y opposer car si vous le faites, votre parcelle est arrachée sans dédommagement », renchérit sous anonymat un conseiller municipal de l’arrondissement de Bétaré Oya où se trouve Longa Mali.

Dans ce village enclavé, M. Ndoyama est l’un des rares paysans à disposer encore d’espace cultivable. Lui voit l’ »avancée des Chinois » comme un risque de « perdre » sa plantation de tubercules de manioc.

« Pas de transparence »

« Ils sont déjà à côté de mon champ (où ils creusent la terre pour chercher de l’or, ndlr). Ils n’ont pas encore piétiné mon espace, mais je crains qu’ils n’y arrivent », affirme-t-il.

« J’attends qu’il y ait une délimitation afin d’engager une procédure pour sauvegarder ma plantation ». A maintes reprises, les populations locales ont demandé, en vain, que les autorités règlent les litiges fonciers en délimitant les zones appartenant à tout un chacun.

Contactés par l’AFP, plusieurs exploitants chinois de la région n’ont pas souhaité réagir.

« C’est trop facile de jeter l’anathème sur les Chinois, mais qui les amène (dans la région)? », réagit Gabriel Yadji, représentant régional dans l’est du ministère des Mines.

« Ce sont les Camerounais qui les amènent à se comporter comme ils le font », ajoute-t-il, soulignant les nombreuses « ramifications » qui mènent à l’obtention d’un contrat minier au Cameroun.

De fait, aucune autorisation officielle n’a encore jamais été attribuée pour une exploitation industrielle de l’or, toute la production restant artisanale.

Alors, des particuliers, des Camerounais principalement, louent ou vendent leurs autorisations d’exploitation artisanale (AEA) à des compagnies étrangères.

« Il n’y a pas de transparence sur les procédures d’acquisition des titres miniers », explique Fôrets développement rural, affirmant avoir essayé « en vain » d’avoir accès au registre des AEA.

« L’armée protège les Chinois »

Dans la presse, les noms de personnalités de premier rang – des généraux, des colonels, des députés, des ministres, un neveu du président Paul Biya… – sont souvent cités comme étant les détenteurs des titres miniers, sans qu’il soit possible de confirmer l’information.

Ainsi, sur l’obtention de ces permis miniers plane des soupçons de corruption, improuvables selon les ONG. « L’armée protège les Chinois dans tous les chanteurs miniers au détriment des communautés riveraines et elle participe à l’intimidation et au racket des communautés », rapporte sous anonymat un cadre de l’une d’elles, très active dans l’est.

Aucune donnée officielle n’est disponible sur les superficies concédées pour l’exploitation aurifère dans l’est du Cameroun, une région réputée riche en ressources mais qui reste très pauvre.

Le gouvernement a bien créé un organe, le Cadre d’appui à l’artisanat minier (Capam), pour canaliser la production artisanale d’or, mais cette structure n’a pas assez de ressources pour retrouver la trace de toute la production, concède un de ses employés.

« Dans bien des cas, nous nous contentons des volumes déclarés par les exploitants chinois », souligne-t-il.

Au Cameroun, la législation stipule que 25% de la production d’or doit être remise au gouvernement. En 2017, le Capam a déclaré avoir rétrocédé 255 kg d’or pour l’ensemble du pays.

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