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Alice Albright : « Il est d’urgent d’apporter une réponse mondiale aux millions d’enfants privés d’école »

Alice Albright, directrice du Partenariat mondial pour l’éducation, veut s’inspirer des modèles de lutte contre les pandémies pour accélérer la scolarisation de millions d’enfants.

Plus de 260 millions d’enfants et d’adolescents ne sont pas scolarisés dans le monde et 93 millions d’entre eux vivent en Afrique subsaharienne, selon les chiffres des Nations unies.

L’éducation n’est pourtant plus une priorité de l’aide internationale, dont la part consacrée à ce secteur, environ 16 milliards de dollars (13,5 milliards d’euros) par an, stagne depuis 2010. Elle recule même dans les pays les plus pauvres. En 2016, le rapport sur le financement de l’éducation dans le monde confié à l’ancien ministre britannique Gordon Brown, puis, il y a quelques semaines, le rapport annuel de la Banque mondiale sur le développement, pour la première fois consacré à l’éducation, ont mesuré les risques de voir une partie non négligeable des futures générations privée d’accès à l’école. La directrice générale du Partenariat mondial pour l’éducation (PME), Alice Albright, appelle à une « réponse urgente et massive », à la mesure des initiatives prises au début des années 2000 pour faire face aux grandes pandémies. Selon elle, le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme ou l’Alliance mondiale pour les vaccins et la vaccination (GAVI), dont elle a été la directrice financière de 2001 à 2009, sont des exemples dont il faut s’inspirer pour s’attaquer à « la crise de l’éducation ».

Créé en 2002, le PME cible les pays les plus pauvres et les zones de conflits. Sur les 65 pays dans lesquels le PME intervient, une majorité se trouve en Afrique. Alice Albright était de passage à Paris le 10 octobre. Emmanuel Macron et le président sénégalais Macky Sall ont accepté de se mobiliser pour réunir 3,1 milliards de dollars dont a besoin le partenariat d’ici 2020. La conférence de reconstitution aura lieu en février 2018 à Dakar.

Quels sont les problèmes que doit résoudre l’Afrique ?

Alice Albright L’Afrique n’est pas la seule région en développement à devoir faire face à une crise de ses systèmes éducatifs mais la crise est ici particulièrement sévère : trop d’enfants ne sont pas encore scolarisés, trop quittent l’école trop vite et la qualité de l’enseignement n’est pas suffisante pour donner une formation qui assure un emploi. J’ajouterai à cela l’inégalité d’accès à l’éducation. Quand vous êtes une petite fille issue d’une famille pauvre et que vous vivez dans une région reculée, quelle chance avez-vous d’aller à l’école ? Aucune.

Les gouvernements consacrent une part de leur budget à l’éducation plus importante que par le passé et c’est une bonne chose, mais les bailleurs étrangers ont réduit leur soutien. Depuis 2010, l’aide publique au développement consacrée à l’éducation stagne. Elle recule même pour l’éducation de base dans les pays les plus pauvres alors que, dans le même temps, ces pays doivent absorber une forte poussée démographique.

En février 2018, vous demanderez aux bailleurs de vous donner plus d’argent. Quels arguments avez-vous pour les convaincre que vous faites mieux que les autres initiatives en faveur de l’éducation ?

Nous sommes le seul partenariat mondial qui travaille uniquement sur l’éducation. Autour de la table, il y a 65 pays en développement, 20 pays donateurs, des institutions multilatérales, des organisations de la société civile, des syndicats d’enseignants, des fondations, des entreprises… Notre approche est globale. Nous aidons les gouvernements à améliorer et à renforcer leur système éducatif dans leur ensemble. Il ne s’agit pas de construire une école à droite ou à gauche, mais de répondre aux problèmes à une large échelle. Une fois le diagnostic posé, nous accordons des dons aux gouvernements pour qu’ils puissent mettre en œuvre leur stratégie. Aujourd’hui, c’est un montant de 500 millions de dollars par an. Si les donateurs répondent à notre appel, ce sera 2 milliards par an d’ici 2020.

C’est un saut important…

C’est exact, mais avec les 3,1 milliards de dollars qui nous manquent d’ici à 2020 pour atteindre cet objectif, nous pourrons travailler dans 89 pays où vivent 870 millions d’enfants c’est-à-dire 78 % de la population non scolarisée dans le monde. Et il faudra encore faire deux fois plus dans les années suivantes. Il est indispensable de faire monter en puissance les financements en faveur de l’éducation si, en 2030, nous voulons être au rendez-vous des Objectifs de développement durable (ODD) qui prévoient que chaque enfant pourra avoir accès à un enseignement de qualité.

Il faut être conscient de cet enjeu. Au début des années 2000, pour s’attaquer aux problèmes sanitaires, des initiatives multilatérales de grande portée ont été créées comme l’Alliance mondiale pour les vaccins et la vaccination (GAVI) ou le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Il faut faire la même chose avec l’éducation.

C’est le modèle qu’il faut suivre ?

Absolument. L’ampleur de la crise de l’éducation appelle une réponse multilatérale massive. Des centaines de millions d’enfants ne vont pas à l’école. Dans dix ans, si rien n’est fait, tous ces jeunes seront sans emploi et, de leur côté, les entreprises ne trouveront pas les qualifications dont elles ont besoin. L’accès à l’éducation est un droit que nous devons offrir à chacun, mais il y a aussi un enjeu économique, migratoire et de sécurité qu’il ne faut pas ignorer.

Vous avez demandé au président sénégalais Macky Sall et au président français Emmanuel Macron de vous appuyer dans votre levée de fonds, pourquoi ?

Il est d’usage que le Partenariat mondial pour l’éducation demande à l’un de ses membres de faire campagne pour sa recapitalisation. Cette fois-ci, nous avons souhaité qu’un pays du Sud et du Nord nous accompagne, car il s’agit de changer d’échelle pour faire beaucoup plus.

Le Sénégal a fait de l’éducation l’une de ses priorités et il s’y attelle de manière déterminée et innovante. Nous considérons qu’il est un modèle en Afrique. Nous nous sommes tournés vers la France, car nous voulions nous appuyer sur un partenaire solide au sein du G7 (le groupe des sept pays les plus industrialisés). Le rôle qu’Emmanuel Macron entend jouer en Europe, sa compréhension des interconnexions qui existent entre les défis que doivent relever les pays européens en matière de migration, d’emplois… et la situation des pays africains et du Sahel en particulier nous ont semblé importants.

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