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samedi, avril 20, 2024
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Affaire Dr Hélène Ngo Kana : le temps des responsabilités sonne-t-il?

« D’un mal peut naître un bien » dit l’adage populaire. À condition que les survivants et acteurs daignent sortir de leur zone de confort pour tirer toutes les conséquences. Si le décès de Dr Hélène Ngo Kana peut amener les acteurs du secteur medico-sanitaire à tirer les conséquences d’une culture de négligences et mercantilisme tolérés, cette jeune dame ne serait pas morte pour rien.

C’est demain que la communauté médicale aura le fin mot sur ce qui s’est exactement passé dans les centres médicaux où a séjourné jusqu’à sa mort, la jeune médecin Hélène Ngo Kana épouse Nlate Mfomo.
Moment important pour les observateurs de tous bords qui suivent cette affaire en ce que la Commission indépendante et technico-professionnelle mise en place par le Conseil de l’Ordre des médecins rend sa copie. Mais aussi pour les acteurs et usagers du service public de la santé au Cameroun. Qu’il s’agisse des personnels médicaux dont une bonne partie que nous avons rencontrés pendant notre enquête, notamment les plus jeunes, n’ont cessé de crier leur mal-être dans un système qui semble largement structuré pour préserver les intérêts des « anciens » dont certains usent et abusent des plus fragiles et du personnel soignant ; ou des familles et patients, qui dénoncent un mercantilisme à tous les niveaux; et bien sûr des pouvoirs publics auprès desquels tous les regards sont tournés mais qui semblent avoir depuis perdu la main sur le contrôle et le suivi de la gestion professionnelle et humaniste des infrastructures et ressources humaines de ce secteur vital de la vie des citoyens dont ils sont responsables, notamment des couches les plus défavorisées qui, faute de couverture maladie universelle, peinent à accéder diligemment à ces services essentiels.

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En attendant donc les conclusions et les recommandations officielles de la Commission Leke, l’attention des observateurs s’arrêtera sur la rôle de la clinique du Gros Chêne dont nos enquêtes depuis l’entrée le lundi 4 janvier de la jeune médecin ont relevé une curiosité qui peut se résumer autour de cette interrogation: comment a-t-il été possible qu’une femme en début de grossesse passe 6 jours entiers dans cet établissement médical alors même que le constat de sa perte de grossesse de 9 semaines a été fait dès le premier jour? Pourquoi a-t-elle été retenue dans ce centre jusqu’à samedi 09 janvier en de debut de soirée alors que son état se dégradait ? Autrement dit dans quel état a-t-elle été référé finalement à l’hôpital général de Douala (HGD), centre de référence médicale dans la capitale économique du Cameroun? Les actes médicaux posés entre le 4 et le 9 janvier ont-ils été les plus rigoureux ou même nécessaires quand on sait qu’aujourd’hui, avec l’évolution de la science médicale, 24h après un accouchement, un patient bien suivi devrait être en état de regagner son domicile? Enfin pourquoi, dans l’état où elle était, la clinique ne l’a pas transférée par une ambulance médicalisée ?
Quant à l’HGD, il va falloir établir pourquoi, alors que visiblement cette patiente à lui référée était dans un état critique, comme l’ont d’ailleurs rapporté ses responsables, n’a-t-on pas immédiatement activé la procédure « d’urgence vitale », obligeant la famille, qui n’avait pas le sou demandé, à perdre du précieux temps en se rendant dans un autre centre médical, l’hôpital gynéco-obstetrique de Douala/Yassa? Pis, pourquoi l’HGD a-t-il exigé le dépôt d’une caution, qui pis, en espèces, alors même qu’il savait qu’il avait suspendu les bons de prise en charge du premier assureur vie, Ascoma, dont la jeune dame était une assurée?

De la Clinique du Gros Chêne à l’HGD en passant par l’HGO/DY, un faisceau de négligences sous fond de mercantilisme qui exposent de multiples responsabilités présumées

Enfin, pourquoi au retour du voyage inutile à l’HGO/DY, elle n’a pas été directement prise en charge jusqu’à l’intervention de son directeur employeur auprès de son collègue de l’HGD? In fine, quelle est cette logique qui voudrait qu’un patient en état critique ne puisse pas être immédiatement pris en charge à l’entrée à l’HGD? Les urgences de cet hôpital public le sont-ils vraiment ? La logique de rentabilité/profitabilité commerciale doit-elle supplanter la logique humanitaire inscrite dans le service public médical ? Enfin, pourquoi dans un établissement public médical, faut-il payer cash les services sollicités au point de refuser les chèques qui, en droit camerounais, sont pourtant autant de moyens de paiement fiables d’autant qu’ils laissent des traces dans la comptabilité?

Par ailleurs, bien que la responsabilité de l’HGO/DY paraisse résiduelle sinon inexistante dans ce drame, est-il admissible qu’un établissement qui venait d’être ouvert au public, au cours d’une cérémonie du reste présidée par le chef du gouvernement, ne dispose pas des infrastructures essentielles nécessaires notamment une unité de Réanimation pour un établissement aussi spécialisé sur les problèmes gynécologiques et obstétriques, objet du séjour de cette patiente dans le système médical? Le Ministère de la santé, dont les observateurs se félicitaient déjà des efforts pour doter les localités camerounaises d’infrastructures de santé spécialisées était-il au courant de la situation pauvre en équipements du dernier hôpital public inauguré à Douala? Si la réponse est oui, pourquoi a-t-il laissé ouvrir? Sinon, ses services chargés des infrastructures sanitaires ont-ils assuré diligemment les protocoles prévus? Dans l’un ou l’autre cas, sa responsabilité politique est au moins engagée au sujet de cette carence révélée par ce drame!

Dans tous les cas, il va falloir tirer toutes les responsabilités, aussi bien politiques que managériales et bien sûr professionnelles et déontologiques que la tragédie du décès d’une jeune médecin, dans les conditions largement rapportées sur cette page, a révélé une vraie crise dans un pays largement en déficit de médecins qualifiés.

Alex Gustave Azebaze
Tel:+237-677-528-757
E-mail : agazebaze@gmail.com

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